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Incarcération de deux magistrats au Bénin
Les clarifications du procureur spécial près la Criet. Mario Mètonou


Le procureur spécial près la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet), Mario Elom’n Mètonou a animé un point de presse le vendredi 23 décembre 2022 au sujet de la mise sous mandat de dépôt de deux magistrats tous poursuivis pour des faits présumés de tentative d’extorsion de fonds en lien avec une procédure judiciaire en cours. Selon ses propos, tout est parti d’une plainte adressée au Garde des sceaux où l’on aurait réclamé par personne interposée une somme de 60.000.000 Fcfa pour obtenir une mise en liberté provisoire formulée par un détenu dans une affaire judiciaire au Tribunal de Cotonou. Ces fonds, selon le procureur spécial, sont destinés à désintéresser la victime de même que les magistrats en charge de la procédure. Après une enquête judiciaire, quatre magistrats sont mis en cause dont deux poursuivis sans mandat. Parmi eux, trois sont des proches de l’intermédiaire. 

En somme, il faut dire que dans cette affaire, 04 personnes sont écrouées et que l’audience prévue pour le 12 janvier 2023 permettra de fixer le niveau de responsabilité des uns et des autres. Lire ci-dessous l’intégralité de la déclaration du procureur spécial près la Criet.    

 

Déclaration de presse du procureur spécial près la Criet   

 

Des informations persistantes font état de ce que les juridictions béninoises sont quotidiennement prises d’assaut par des individus qui, se prévalent de leur proximité plus ou moins avérée avec certains magistrats, servent d’intermédiaires ou se font remettre des sommes d’argent par des justiciables ou leurs parents contre la promesse de faire triompher leurs causes devant nos cours et tribunaux. 

Le parquet spécial près la CRIET a déjà initié des poursuites contre des personnes impliquées dans ce genre de trafics. Certains ont été condamnés à de lourdes peines, d’autres sont dans l’attente de leur jugement.

C’est dans ce contexte que le 07 décembre 2022, le Garde des sceaux a reçu la plainte d’une justiciable relative à des faits présumés de tentative d’extorsion de fonds en lien avec une procédure judiciaire en cours. 

L’intéressée y expose que son époux poursuivi comme elle-même en flagrant délit, devant le tribunal de première instance de première classe de Cotonou, est détenu depuis le 21 novembre 2022 pour des faits d’abus de confiance portant sur la somme de 84.000.000 Fcfa. 

Dans cet établissement pénitentiaire, son époux a été approché par un autre détenu qui lui a fait la promesse de mettre à contribution son réseau dans le milieu judiciaire pour lui obtenir une remise en liberté dès la première évocation de son dossier à l’audience du 07 décembre 2022. 

Dans cette optique, ce dernier a fait appel à une intermédiaire qui s’est rendue à la prison civile de Cotonou. L’intermédiaire a exigé le versement d’une somme de 250.000 Fcfa destinée à organiser un déjeuner au profit des magistrats en charge de la procédure. Elle devrait profiter de ce déjeuner pour négocier la libération.

Mise à part cette somme, le détenu devait lui verser quatre millions de Fcfa à remettre aux magistrats pour sceller l’affaire.

La somme de 250.000 a été effectivement versée.

Par contre sur les quatre millions exigés pour les magistrats, le détenu n’a pu réunir qu’un million. En recevant cette somme, l’intermédiaire aurait manifesté son mécontentement et aurait indiqué que le dossier serait renvoyé jusqu’au paiement intégral

Advenu le jour du procès, la demande de mise en liberté provisoire formulée par le détenu, a été rejetée et l’audience a été renvoyée au 11 janvier 2023 en vue du désintéressement de la victime des faits présumés d’abus de confiance.

Percevant dans le rejet de la demande de mise en liberté provisoire de son époux et le renvoi de la cause, une mesure représailles, la plaignante a dénoncé les faits au Garde des sceaux, lequel a chargé l’un de ses collaborateurs, magistrat de lui faire un rapport sur la procédure en vue de la saisine éventuelle de l’inspection des services judiciaires

Ce collaborateur, après avoir pris connaissance du dossier, aurait suggéré à la plaignante de mobiliser afin d’obtenir la libération de son époux, la somme de 60.000.000 Fcfa décomposée comme suit : 

-53.000.000 pour désintéresser la victime

-7.000.000 pour ses collègues en charge de la procédure

Vu la gravité de ces faits et leur récurrence, nous avons ouvert une enquête qui a mis en cause quatre magistrats dont il s’avère que trois sont des proches de l’intermédiaire.

Présentés à notre parquet au terme de l’enquête, l’intermédiaire ainsi que le détenu l’ayant mis en contact avec l’époux de la plaignante ont été placés sous mandat de dépôt en même temps que deux magistrats. Les deux autres magistrats sont poursuivis sans mandat.

Il est à préciser que les chefs de poursuite sont l’abus de fonction, la tentative de corruption d’agent public et l’escroquerie.

Ces infractions sont sévèrement punies par la législation béninoise. Les peines varient entre 05 et 20 ans de réclusion criminelle. En présence de circonstances aggravantes, ces faits sont punis de la réclusion criminelle à perpétuité.

L’audience prévue au 12 janvier 2023 permettra de fixer le niveau de responsabilité des uns et des autres. 

Le parquet spécial réaffirme sa détermination à poursuivre, sans relâche le fléau de la corruption dans notre pays, y compris dans le secteur de la justice. 

C’est le lieu de rappeler à tous les usagers de nos cours et tribunaux qu’ils n’ont besoin d’aucun intermédiaire, à l’exception des professionnels de droit spécialement habilités pour faire triompher leur cause devant la justice béninoise.

Je vous remercie.   



La Rédaction
 
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