La révision de la constitution, une fausse solution (Plutôt que de penser à la crise, les députés veulent prolonger leur bail)
Pour sortir de la crise pré-électorale née de l'application stricte du nouveau code électoral et de la charte des partis politiques, le comité paritaire mis en place par le président de l'Assemblée, a sorti une proposition de loi modifiant ces deux textes mais aussi proposer une révision de l'article 80 de la Constitution afin de proroger le mandat des députés. Mais au sein de l'opinion la révision de la Constitution pour prolonger le mandat des députés pour 45 jours s'apparente à un coup politique des députés et s'annonce déjà comme une démarche mort née, car en 2007, sur le même principe, la Cour constitutionnelle avait déjà rejeté une révision constitutionnelle qui prolongeait le mandat des députés.
Est-il opportun de réviser la Constitution avant de régler le problème né de l'application des textes organisant les élections en République du Bénin ? Au lendemain de la publication via la presse et les réseaux sociaux des propositions faites par le comité de crise mis en place par le président de l'assemblée, ils sont nombreux ces béninois qui demeurent perplexe quant à l'opportunité d'une telle proposition et d'autre part ses réelles chances de franchir le palier de contrôle de constitutionnalité devant la Cour constitutionnelle. En effet, la Constitution béninoise en vigueur depuis 1990 a résisté à toutes les tentatives de révision. Les deux dernières tentatives sont celles du président Patrice Talon, qui ont échoué à quelques voix près malgré les bonnes mesures proposées pour renforcer l'Etat de droit, mieux encadrer le pouvoir du président de la République ou encore limiter le mandat présidentiel à un unique septennat. La proposition faite par le comité de crise affiche donc toutes les chances de ne pas aboutir. Car, qu'il vous souvienne que déjà en 2007, la cinquième législature, sous le prétexte qu'il manque de moyens pour organiser les élections législatives, a voté une révision constitutionnelle pour un couplage des élections législatives de 2007 et des élections municipales, communales et locales de 2008. Mais la Cour constitutionnelle a jugé que ce vote n'était pas conforme à la Constitution. Cette jurisprudence de la Cour constitutionnelle qui est encore frais dans les mémoires fait dire aux observateurs avertis que même si la proposition de révision de la Constitution arrivait à requérir les 5/6 des voix des députés composant l'Assemblée nationale, il y a de faibles chances qu'elle arrive à franchir le barrage du contrôle de constitutionnalité à la Cour constitutionnelle. Dès lors, le statu quo serait maintenu pendant que la Commission électorale nationale autonome (Cena), poursuit sans discontinue, la mise en oeuvre de son calendrier initial qui prévoit le 28 avril prochain comme jour du scrutin.
Edith GAGLOZOUN